Yann-Edith. Les hauts de Hurlevent d'Emily Brontë.
Les Hauts de Hurlevent appartient à la collection Ex-libris (éditions Delcourt) qui présente des adaptations de grandes oeuvres de la littérature en bande dessinée. Ces albums ( deux tomes) ont été salués à leur sortie par de nombreuses revues spécialisées de BD comme un excellent ouvrage. C'est pourquoi je me suis lancé sans restriction dans la lecture de cette BD de Yann et Edith et quelle n'a pas été ma déception!
La revue scénario d'avril 2009 vantait la BD en présentant l'ouvrage de Brontë comme un classique romantique dont la version originale a fait baîller des générations de collégiens imperméables par ses longueurs et l'inaction qui tiennent une place relativement importante. Position que je réfute totalement .Les hauts de Hurlevent sont une oeuvre majeure de la littérature anglaise et mondiale, n'ennuient que les
ennuyeux et passionnent encore des générations de potaches. L'adaptation de Yann s'est certes débarrassé des longueurs et l'inaction pour ne garder que l'intrigue, mais le scénario laisse de côté l'essentiel du roman. L'adaptation est toujours une trahison, mais
peut-on se permettre de rejeter des scènes clefs du roman. Il me manque la déclaration inoubliable d'amour de Catherine : I am Heathcliff. J'attendais la scène d'amour morbide quand Heathcliff exhume le cadavre de Catherine, et rien. Les personnages ne sont que des caricatures, alors que dans le roman se sont des êtres complexes, torturés, enfermés dans les contraintes du milieu. Dans la BD, je ne retrouve jamais le Heathcliff, rongé par la passion, la solitude, la violence, par l'idée de la mort, je le vois seulement grimaçant. Je n'ai pas trouvé dans la BD l'histoire d'amour fou entre deux êtres à l'orgueil exacerbé que l'inégalité de leur position sociale sépare. Où est la langue de Brontë? Elle est ramenée à des dialogues sortis de la langue courante actuelle bien pauvre. Les dessins de Edith, quasi enfantins, ne rendent jamais l'atmosphère des lieux. Où sont les landes sauvages battues par le vent, le manoir lugubre où traînent les fantômes. Chez Emily Brontë la nature influence les humeurs des hommes, les façonne avec âpreté.
François Truffaut déclarait à propos de l'adaptation du roman au cinéma qu'elle n'est acceptable que si l'auteur réussit : " à faire a) la même chose b) la même chose en mieux c) autre chose de mieux. Inadmissibles sont l'affadissement, le rapetissement, l'édulcoration". Cela vaut aussi pour la BD.
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