Alain Corneau. Série Noire.
"Série Noire" réalisé par Alain Corneau est sorti sur les écrans en 1979. Georges Pérec a participé à l'adaptation du roman de Jim Thompson paru en France sous le titre "Des cliques et des cloaques", il est aussi l'auteur des dialogues. Les vainqueurs du jour: Eeguab, Valentyne, Somaja, Aifelle, Miriam, Keisha, Asphodèle.
Synopsis:
Dans la banlieue parisienne, Franck Poupard, minable représentant de commerce rencontre lors d'une des ses tournées une vieille femme qui lui propose de coucher avec sa nièce, Mona, contre une robe de chambre en laine. Franck se refuse de profiter de la situation et s'éprend de la jeune fille. Quand il apprend que la tante planque un magot chez elle, Franck décide de l'éliminer…
Mon avis:
Le film adapté par Alain Corneau et Georges Perec est très fidèle à l'esprit poisseux du roman de Jim Thomson. Franck Poupard est un médiocre représentant de commerce qui fait du porte à porte dans des banlieues pavillonnaires sordides, au milieu de friches industrielles et de terrains vagues défoncés, sous un ciel plombé. Dans ces quartiers délabrés, Franck ne croise que des êtres aussi misérables, socialement et culturellement que lui. Une vieille femme, avare et maquerelle, prostitue une nièce de seize ans. Tikides, un immigré naïf, un peu débile, fait une victime rêvée pour Franck. Staplin, le gérant de sa société, est un homme affable, mielleux, cauteleux, lâche mais qui exploite les misères du monde. Quand Poupard rentre chez lui, c'est pour retrouver un logement crasseux, mal tenu par sa femme, Jeanne, qu'il juge responsable de sa condition. Franck veut se cacher ce qu'il est, violent, malhonnête en faisant reporter sur les autres ses échecs.
Les dialogues souvent drôles, signés Georges Pérec, viennent briser le côté glauque, crasseux, naturaliste du film. La langue de Poupard est faite d'images, d'anglicismes, de jeux de mots parfois totalement inadaptés à la situation. Les dialogues décalés créent parfois un effet quasi surréaliste. Ainsi, quand Franck se fait racketer par son patron, il lui assène une série de gifles et la seule réaction de Staplin est de déclarer : "Je vais y aller, je commence à avoir chaud aux joues".
"Série Noire" bénéficie d'une distribution exceptionnelle. Les seconds rôles sont justes et inoubliables: Bernard Blier, Myriam Boyer et Marie Trintignant mais la véritable force du film c'est Patrick Dewaere que la caméra de Corneau ne lache pas d'une seconde. Il habite le personnage complexe de Poupard, parfois violent ou charmeur, roublard ou naïf, dramatique ou comique. Dewaere a souvent répété que ce rôle a été le plus important de sa carrière, malheureusement trop courte.
Un excellent film.